IL ETAIT UNE FOI
Mes bien chers frères.
En vérité je vous le dis, le religieux et ses mystères sont le nouveau créneau cinématographique. Une surprise mitigée, mais une surprise tout de même dans le paysage du film courant, de genre le plus souvent. Piranha (3D), Sucker Punch, Cow boy contre envahisseurs (3D ?) sont le "genre" qui bourre les salles obscures (autant que les scénaristes, bourrés ou obscurs au choix). Le spirituel parvient paradoxalement à glisser ses ailes dans ce monde de brutes. Il est temps de vous agenouiller, le prêche va commencer.
La révolution des bluettes.
Un temps de cochon cet été, il faut bien le dire, surtout à Madrid. La messe sous des trombes d'eau, on a frôlé l'apocalypse, devant des K-way, des sacs poubelles, des parapluies (contre un coin de paradis ?), tandis que se lève le doigt de Dieu dans la manche de Benoit seize, quasi extatique dans sa tenue pourpre hydrofuge. Rappel des évènements.
En Mai fait ce qu'il te plait, à La Puerta Del Sol, les Indignados, vous vous souvenez. L'occupation de cette superbe place publique à Madrid, après que la gauche espagnole ait été remerciée. Les Indignés, ça a de la gueule, fut une prise de conscience de l'autodetermination possible, dans un neovillage au centre de la ville. L'apprentissage, tout le monde il est beau certes, d'une forme de "démocratie" alternative, sur des vélléités franchement communicatives, dans une ambiance festive et propice à l'invention débrouillarde. La vie en somme.
A Madrid au mois D'Août, les indignés ont fait place aux résignés. Plus question d'utopie rigolote. Mon frère, la réponse est déjà écrite. Tu sais pas lire ? alors ouvre grand tes yeux.
Un vrai rassemblement de cette belle jeunesse venue du monde entier, yeux lévés vers le ciel, avec comme seuls bagages l'amour du prochain et la dernière "appli" I phone, "prie en espagnol". Pendant ce temps, nos Indignés ont fait connaissance avec la matraque, n'ayant pas eu le temps de télécharger "Qui aime bien châtie bien". Mais la préoccupation de tous était bien la rencontre ultime, la preuve terrestre de ce vers quoi toute leur énergie se concentre. Le messager, le boss, incarné par le Pape Benoit . Je sais, dis comme ça, c'est pas porteur. C'est bien la raison d'être du clip.
Chaussée aux moines.
Sur cete voie de la spiritualité, la vie monastique est une mine d'inspiration inépuisable. Certes les fantasmes qu'on peut nourrir à cet endroit ne peuvent plus l'être dans la réalité. Le religieux se dissimule, s'intègre, s'émancipe, voire rejoint les préoccupations de la socièté civile. Le mariage, l'homosexualité sont de la partie, et c'est tant mieux, mais pour le commun des mortels que nous sommes, la fascination se ramollit un peu. Il faut se retourner vers les enluminures du passé, où la mission de l'éclésiastique cotoie le sacrifice, la douleur et la solitude. Rentrer dans les ordres c'est quitter ce monde cruel et faire abstraction des tentations qui polluent la méditation. Il en va de même pour celles qui prennent le voile, pour convoler avec le Seigneur à l"intérieur d'un couvent".
Le doute est bien le sujet qui préoccupe les cinéastes depuis des lustres. Et son corollaire, le sexe, souvent. Et l'actualité confirme ce doute et les notres sur la tentation.
Délivrez-nous du mâle.
L'abbé Donissan et Mouchette se perdent "Sous Le soleil de Satan", incarnés par Gerard Depardieu et Sandrine Bonnaire. C'est du pialat de 1987, palme d'or à Cannes. Un prêtre qui doute, une jeune fille meurtrière. Le suicide rédempteur de Mouchette permet à l'abbé de retrouver cette foi égarée, devenant un faiseur de miracle. Pialat, adaptant Georges Bernanos, plonge ses personnages fragilisés dans un monde hostile. La souffrance qu'il provoque amène l'abbé à se surpasser, et à y gagner des certitudes.
Le curé d'Ambricourt, en revanche, n'est pas à la hauteur de ses fonctions. En 1951, "Le journal d'un curé de campagne" de Robert Bresson, est fidèlement adapté du même Bernanos. On est loin de la "fureur" de Pialat. Aucune fioritures chez Bresson, il va a l'essentiel, quasi documentaire, le jeu des acteurs étant réduit à sa plus simple expression. Le film d'un croyant.
ça se gatte avec Jean-Pierre Melville en 1961. "Léon Morin, prêtre", c'est l'inattendu Jean-Paul Belmondo, vedette deux ans plus tôt chez Godard dans "A bout de Souffle".
Et oui, il est beau Léon. Circonstances atténuantes: la guerre ? cette transgression des valeurs humanistes n'est-elle pas la porte ouverte à d'autres transgressions ? Garder la tête froide, c'est bien un rôle taillé sur mesure pour Belmondo...comme sa soutane. Ne nous délivrez pas du mâle.
L'Eglise n'a jamais condamné les représentations qu'on peut en donner. Enfin pas souvent. On se souvient des avis de l'"Office Catholique" dans Télérama qui "notait" les programmes télé en fonction de leur respect de la morale (catholique évidemment), des manifestations déclenchées par les films de Scorcese ou plus récent de Mel Gibson, de loin le plus sanglant. Les événements de ces derniers jours en réaction à la pièce de Romeo Castellucci "Sur le concept du visage de Dieu", au Théâtre de la Ville, menés par des "intégristes", les mêmes probablement que ceux qui menacent les médecins qui pratiquent l'avortement. Un bon médecin est un médecin mort.
Que dire de Pier Paolo Pasolini , athée s'il en est, blasphémateur souvent, et de son prix du Vatican pour son film "L'évangile selon Saint Mathieu" en 1964 ? Une image fidèle au récit, poètique, un vrai cours de cathé qui renvoie Cecil B. de Mille au placard, d'autant que l'arrière plan politique de l'histoire n'est pas oublié. Le mystère de la foi y trouve là sa meilleure illustration, loin du film "Des hommes et des Dieux", on va en reparler.
Un Vatican photogénique, qui soigne sa com, même quand les sujets épineux(préservatif ? les prêtres pédophiles ?) sont abordés.
Gothique.
Ils ne savent pas ce qu'ils
perdent
Tous ces fichus calotins
Sans le latin, sans le latin
La messe nous emmerde
A la fête liturgique
Plus de grand's pompes, soudain
Sans le latin, sans le latin
Plus de mystère magique
Le rite qui nous envoûte
S'avère alors anodin
Sans le latin, sans le latin
Et les fidèl's s'en foutent
O très Sainte Marie mèr' de
Dieu, dites à ces putains
De moines qu'ils nous emmerdent
Sans le latin
Putain, trente ans. Brassens exprime parfaitement la nostalgie des mécréants. Ceux qui s'extasient devant ces voûtes parfaites, les pas qui résonnent, et les voix chuchotées de ces quidam qui craignent de déranger quelqu'un ou quelque chose. ça a de la gueule une cathédrale. L'inconscient populaire, les traces du passé fantasmés dans une architecture audacieuse, qui nous ramène aux sortilèges de la forêt romantique, profonde, obscure. C'est précisément dans cette atmosphère que naît le roman gothique.Et le roman gothique, c'est tous les clichés que va adopter la Hammer, pour ses films d'horreur dont Christopher Lee est le VRP le plus classieux.
"Le Moine" (the Monk) de
Dominik Moll est une pâle adaptation du roman éponyme de Matthew Gregory Lewis, écrit en 1794, et considéré comme le créateur du genre. Horrifique et terrifiant, il fut bien
sûr, condamné par l'église. Beaucoup plus sulfureux que ne l'est le film, qui souffre(soufre ?) en plus du contre-emploi offert à Vincent Cassel.
Et des contre-emplois il y en a d'autres.
Mauvaise foi
Prenons par exemple "Des Hommes et des dieux " de Xavier Beauvois, et son succès un peu inattendu, il faut bien le dire. Le massacre des moines de Thibirine, en 1996, aurait pu être l'occasion, 15 ans plus tard, d'en donner une explication. On reste sur sa faim, en revanche, le spectateur sait tout de la santé dentaire et de la glotte des différents personnages. Tout finit par des chansons. Un psaume toutes les dix minutes ! Le mystère de la foi qui les anime et qui les mène droit à la mort est pour le moins mystérieux.
le deuxième sur la gauche, c'est l'excellent Olivier Rabourdin. approchons nous de lui sur un autre plan.
Olivier Rabourdin, donc, on l'a déja vu dans Braquo et dans les "Beaux Mecs" une série française particulièrement réussie. Difficile alors de l'imaginer autrement que comme ça, même si la magie de l'acteur est au rendez-vous.
Mauvaise foi donc.
Miraculeux.
Je n'aborderais pas le douloureux cas de conscience de "Mon Curé chez les Nudistes", que l'épiscopat français n'a pas excommunié, que je sache. La gaudriole ne peut être foncièrement irrespectueuse, elle a un bon fond on n'en doute pas. "Cent coups de fouet si vous n'êtes pas morts de rire" Merci Luz, je cherchais mes mots.
On tombe vraiment au fond. De la grotte. De Lourdes. Deux versions auxquelle vous ne couperez pas.
Sylvie Testud dans le film de Jessica Hausner, "Lourdes", brebis égarée, que Mgr Perrier, c'est fou, n'a pas aimé !
Michel Serraut dans le "Miraculé" de Jean Pierre qui ? Mocky of course. La bande annonce o-bli-ga-toi-re. Qu'en pense Mgr Perrier ?
Allez, c'est l'heure, je range ma soutane et au lit.