Case Prison

Ouverte en janvier 2002, après l'attaque du 11 septembre, par Georges Bush, la prison de Guantánamo a connu quatre présidents. Les velléités de Barack Obama n'ayant pas abouti, Donald Trump en a remis une couche et il ne faut pas compter sur le dernier en date pour clore le débat de sa fermeture. Il ne reste actuellement qu'une cinquantaine de prisonniers, dont l'avenir est plus qu'incertain.

Le cinéma s'est emparé de la question des prisonniers et des conditions de détention.

La torture au centre du débat, avec deux visions distinctes que 8 années séparent.

Zero Dark Thirty de Catheryn Bigelow ( réalisatrice aussi de Démineurs et Détroit ) en 2013, relatant les 10 ans de traque de Ben Laden. et  Désigné coupable (The Mauritanian) de Kevin Macdonald adaptant le témoignage de Mohamedou Ould Slahi emprisonné près de 15 ans à Guantanámo, dénonçant la torture quotidienne.

Dans les deux cas, les prisonniers sont joués par deux acteurs français haut de gamme. Tahar Rahim est Mohamedou et Reda Kateb, Ammar . Si vous avez de la mémoire, vous les avez forcément vus dans Un Prophète, en 2009 de Jacques Audiard. Déjà en prison.

LA QUESTION
LA QUESTION

Je vais te briser

Comment ne pas éprouver de l'empathie pour ce personnage sympathique d'emblée ? Les premières images du film, sa gentillesse, sa bienveillance confortent l'innocence de Mohamedou, le mauritanien emprisonné à Guantánamo pendant une bonne quinzaine d'années, comme les 700 autres, après avoir été capturés comme terroriste. L'histoire est vraie, l'homme hors norme, et les acteurs bons pour les oscars.

Tahar Rahim campe un Mohamedou intelligent, incroyablement résistant à la torture, et pas rancunier (grâce à Dieu ?). Il ne sait rien, mais ils disent tous ça... une raison de plus pour essayer autre chose, encore plus humiliant, douloureux, sonore notamment (du heavy metal à fond !). Le hasard va en faire un justiciable qu'une avocate (Jodie Foster) va défendre.

Ammar interprété par le génial Reda Kateb, dans le film de Kathryn Bigelow, finit par avouer ce qui va permettre de trouver la piste de Ben Laden, preuve de l'efficacité de la méthode brutale. Une vision manichéenne des événements pour les opposants au film de l'époque (katrynbigelowgate !) et une complaisance malsaine des séquences du début. Juste avant, l'écran est noir, et l'on entend les appels téléphoniques, les derniers mots des prisonniers du world trade center qui va s'écrouler. La vengeance est en marche, a tout prix.

La torture, systémique, presque une routine, faite de véritables protocoles, reproductibles et donc exportables vers les nations qui souhaitent s'en équiper.

Je peux te parler franchement ? Tu vas pas apprécier. Je suis pas ton ami. Je vais pas t'aider. Je vais te briser. T'as des questions ?  VF Zero Dark Thirty

 

 

Vous pouvez répéter la question ?

Au moyen-âge faire avouer ses crimes à un accusé passe par la question. Euphémisme ou pas, c'est le terme utilisé pour la torture, qui depuis le treizième siècle fait parti de l'arsenal judiciaire. Obtenir des aveux par la question est une option parfois utilisée au cours d'un procès. Mais les conditions de détention ont souvent un impact psychologique convaincant sur la coopération du prévenu.

...Si la torture s’apparente à «  une brutale intrusion dans l’âme par l’intermédiaire de la chair  » ... et si elle vise à arracher une vérité qui se loge dans le corps, le tortionnaire ne peut utiliser que des moyens licites. Le premier est celui de la compression des membres : le prévenu est dénudé, puis étendu sur le chevalet ou sur le tréteau. Si la victime se refuse à avouer, le bourreau exerce une pression sur le corps étendu sur la poutre et étiré par les pieds et les mains. La deuxième technique - tristement célèbre - consiste à abreuver de force et en continu le prévenu. Troisième scénario, le plus fréquent : on suspend le prévenu au moyen d’une corde passée dans une poulie fixée au plafond, en lui liant les mains dans le dos et en lui mettant des poids aux pieds pour l’alourdir.

Arnaud Fossier, « Soumis à la question », La Vie des idées , 19 mars 2018. ISSN : 2105-3030. URL : https://laviedesidees.fr/Soumis-a-la-question.html

 ...L’exécuteur des «  hautes œuvres  » n’était autre que le bourreau, à moins qu’il ne s’agisse du geôlier ou d’un sergent du roi, mais il y n’y a guère qu’à la capitale que le métier de tortionnaire se professionnalise au début du XVe siècle. Au Châtelet notamment, un sergent à verge dont les connaissances en anatomie se précisent au fil du siècle se voit attribuer le rôle de «  tourmenteur  » (en parallèle de ses fonctions habituelles), puis la qualité de «  questionneur  » devient un office à part entière à la fin du XVe siècle.

Pas de quoi rire ?

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